13 juin 2005

Antoine IV Capissuchi de Bologne (1602-1615).

Blason de la famille de Capizucchi de Bologne sur HeraldiqueGenWeb
LA FRANCE PONTIFICALE (GALLIA CHRISTIANA)
HISTOIRE CHRONOLOGIQUE ET BIOGRAPHIQUE
DES ARCHEVÊQUES ET EVEQUES
DE TOUS LES DIOCÈSES DE FRANCE
PAR M. H. FISQUET
MÉTROPOLE D'AIX
DIGNE
1ère PARTIE
Contenant DIGNE ET RIEZ.

BnF/Gallica : http://gallica.bnf.fr/document?O=N204180
pages 103 à 108

Armes : d'azur à la bande d'or.

Dessin d'Amaury de la Pinsonnais publié avec l'aimable autorisation de HeraldiqueGenWeb

La famille de Bologne tire son origine de la maison des Capissuchi, que certains historiens font remonter à un prince goth venu en Italie dès l'année 460. Elle a donné â l'Eglise, trois cardinaux Robert, créé par le pape Victor III, ainsi que le rapportent Ciaconius et divers actes authentiques conservés dans les archives de la famille des Capissuchi; Jean Antoine, cardinal évêque de Lodi, mort le 29 janvier 1569, et Raimond Camille Capissuchi, créé le 1er septembre 1681, par Innocent XI, cardinal du titre de Sainte Marie des Anges, et mort le 22 avril 1691.

Un autre membre de cette famille, Paul Capissuchi, fut successivement auditeur de rote et évêque de Nicastre en Calabre. C'est lui qui en sa qualité de doyen de la rote, fut chargé de faire au pape Clément VII, le rapport sur la demande adressée à la cour de Rome par Henri VIII, roi d'Angleterre, pour obtenir l'autorisation de rompre son mariage avec Catherine d'Aragon, sa femme légitime, afin d'épouser Anne de Boleyn dont il était éperdument épris.

Ce rapport ne fut point favorable au roi; Paul Capissuchi décida que ce prince avait encouru les censures ecclésiastiques pour s'être remarié sans avoir attendu la décision du Saint-Siège, et qu'en conséquence, d'après l'examen des faits, Catherine d'Aragon devait être rétablie et maintenue dans sa dignité. On sait le cas que le monarque anglais fit de cette décision.

Au XVème siècle, un membre de la famille des Capissuchi vint s'établir à Barcelonnette, dans les États du duc de Savoie; plus connu par le nom de la ville dont il était originaire, c'est-à-dire, celle de Bologne en Italie, que parle nom de sa famille, il fut surnommé de Bologne et ses enfants portèrent ce nom qu'ils transmirent à leurs descendants en ne prenant que rarement celui de Capissuchi.

Antoine de Bologne, né au hameau du Plan, commune de Barcelonnette, alors diocèse d'Embrun, était fils de Rodolphe de Bologne et le troisième de sept frères, qui tous occupèrent une brillante position, soit dans l'Église, soit dans l'Etat. Parmi ces frères, Étienne fut chapelain ordinaire de Henri III, qu'il confessa au moment de sa mort à Saint-Cloud et remplit les mêmes fonctions auprès de Henri IV son successeur; Jules fut gentilhomme ordinaire de la chambre du roi Louis XIII, gouverneur de Nogent en Champagne, et Claude, l'aîné des sept frères, suivit avec succès la carrière du barreau, et eut l'administration des biens patrimoniaux.

Antoine de Bologne entra jeune encore dans l'Ordre des Minimes, et fut successivement correcteur du couvent de Grenoble et procureur de celui de Mâcon. Henri IV avait pour lui une grande estime, ainsi qu'il résulte de deux lettres de ce prince dont l'original est aujourd'hui entre les mains de M. l'abbé Aubert, chanoine de Digne, allié à la famille de Bologne, et qui a bien voulu nous les communiquer. La première est adressée à Lesdiguières et la seconde à Antoine de Bologne lui-même. Elles sont ainsi conçues:

Mons. de Lesdiguières, mon lieutenant général au gouvernement du Dauphiné.

Mons. de Lesdiguières, la connaissance que j'ai des bons et agréables services que P. Antoine de Bollogne, correcteur du couvent des Minimes de ma ville de Grenoble, m'a rendus en plusieurs occasions où il a esté employé, et de la fidélité et affection qu'il y a apportées, me convie de vous faire la présente pour vous prier l'avoir pour recommandé en tout ce qu'il pourra avoir affaire de votre faveur Sur ce, etc.
Le 3ème jour de juin 1601. HENRY.


Cher et bien-aimé, Nous faisons entendre au R. P. de la (nom illisible) la volonté que nous avons que vous ne bougiez encore de notre ville de Lyon pour y continuer vos prédications accoutumées à l'instruction de nos sujets d'icelle, afin que s'il arrivait que votre supérieur vous en voulut faire partir pour aller ailleurs, de lui faire savoir mon intention, disposant vos supérieurs, autant qu'il vous sera possible, à suivre cette mienne volonté qui ne tend qu'a l'édification de nos sujets et au bien de nos affaires de France.
Donné à Paris, ce « HENRY. »


Son frère Louis avait, le 10 juin 1598, succédé comme abbé commendataire de Livry au diocèse de Paris, et non pas de Ligny, comme le dit Gassendi, à son autre frère Etienne. Il échangea cette abbaye avec Claude Coquelet, qui, à son tour, céda à Antoine l'évêché de Digne. Des bulles pour ce siège ayant été accordées à ce dernier, au mois de mars 1602, Antoine fut sacré à Lyon le 10 juin suivant, par Jean Fabre, archevêque de Tarse, assisté de Gaspard Dinet, évêque de Mâcon, et de Robert Berthelot, évêque de Damas. S'il faut en croire Gassendi copié par Louvet et par les auteurs de la Gallia christiana, à peine arrivé à Digne, Antoine intenta de nombreux procès au chapitre, aux bourgeois et à plusieurs communautés de son diocèse. Il épuisa toutes les juridictions, et plaida à la fois devant le parlement d'Aix, au conseil du roi, et à l'officialité primatiale de Vienne. Aussi toute sa vie, outre les peines de l'esprit, eut-il à supporter presque toujours diverses maladies. L'illustre prévôt de Digne laisse percer un sentiment d'aigreur, en ajoutant qu'Antoine mourut accablé d'infirmités et épuisé de forces, parce que sa vie n'avait point été tranquille, Quia non desit vitam tranquillam.

On peut répondre à Gassendi que l'évêque Antoine de Bologne ayant été longtemps procureur dans un couvent, y avait contracté des habitudes d'ordre, d'économie, de sévérité même qui devaient naturellement contraster avec les abus nombreux qui s'étaient introduits dans le chapitre de Digne par suite de la non-résidence des évêques. Les deux lettres de Henri IV que nous venons de citer, indiquent assez Antoine de Bologne comme un homme instruit et un bon religieux, et pour que Gassendi et les auteurs qui l'ont suivi eussent raison, il faudrait qu'ils pussent citer des faits, et c'est ce qu'ils ne font pas. On s'explique encore cette aigreur par un fait mentionné dans la vie de Gassendi et dans les histoires de Provence.

Vers 1612 ou 1613, Gassendi fut désigné par le chapitre de Digne pour remplir les honorables fonctions de théologal, laissées vacantes par la mort de l'abbé Araby, titulaire de cette charge. Mais Pélissier de Bologne, homme bien placé en cour, chapelain ordinaire du roi, et cousin germain de l'évêque Antoine, se fit délivrer par Louis XIII un brevet de ce bénéfice; Gassendi fut obligé de venir à Paris défendre sa cause devant le conseil du roi qui maintint sa nomination.

Peut-être en cette circonstance, Antoine de Bologne avait-il soutenu son parent, peut-être aussi, Gassendi, avec son sensualisme, paraissait-il suspect au prélat et d'opinions trop avancées ? Ce qui est certain, c'est qu'Antoine de Bologne n'avait point de préventions contre les savants. En 1602, à sa première visite à Champtercier, Gassendi, âgé seulement de dix ans, avait harangué l'évêque en latin avec tant de vivacité et de grâce, qu'Antoine de Bologne ne put contenir une exclamation de surprise, et dit aux personnes de sa suite :

« Cet enfant sera un jour la merveille de son siècle. »

Le château épiscopal de Digne avait été pris en 1576 par les calvinistes, et depuis ce temps, les évêques ayant cessé d'y résider, on négligea de le réparer et de l'entretenir, parce qu'on crut qu'il ne convenait point de conserver un lieu qui pouvait de nouveau servir de refuge à des troupes ennemies. Aussi, Antoine de Bologne, en arrivant à Digne, fut obligé, pendant quelques années, de prendre une maison à loyer dans cette ville. Il fit ensuite bâtir une maison assez spacieuse, à l'extrémité du faubourg de la Traverse.

Cependant, à son décès, il la laissa non à son église, mais au Cadet de ses frères, Jules de Bologne, gouverneur de Nogent en Champagne. Ce dernier la vendit aux religieuses de la Visitation, arrivées à Digne en 1630. Transformée par celles-ci en couvent, la maison d'Antoine de Bologne est aujourd'hui une caserne de gendarmerie.

Antoine de Bologne mourut le jeudi 24 septembre 1615, au château de Tanaron dont les évêques de Digne étaient seigneurs. Guillaume Faucon et quelques autres membres de sa famille firent transporter son corps à Digne pour être inhumé au milieu du choeur de l'église Saint-Jérôme. Flayosc lui avait même fait élever un monument en pierre que surmontait la statue du prélat, comme s'il avait été le fondateur de cette église, ou du moins, comme s'il l'avait enrichie et embellie. Mais lorsqu'on restaura complètement les stalles du choeur, ce monument fut brisé et la statue fut jetée dans un caveau situé entre le grand autel et la sacristie. Elle a été depuis retirée de ce lieu et placée dans une chapelle latérale. On y trouve aussi l'inscription suivante que nous avons relevée.



Au Révérendissime Père en Dieu Antoine de Bologne, issu de la noble et ancienne famille des Capissuchi, évêque de cette Église qu'il a très dignement gouvernée pendant treize années; l'évêque Louis; Etienne, conseiller et aumônier du roi; Jules, gouverneur des troupes de la Champagne, ses frères; Raphaël, son neveu, coadjuteur, ont élevé ce monument de leurs regrets. Il mourut l'an du salut 1615, le 8 des calendes d'octobre. »

Sous l'épiscopat de ce prélat et pendant son administration, les religieux Récollets ou Frères Mineurs réformés s'établirent à Digne par les soins des PP. Foulque et Ribeira, orateurs distingués. Leur église fut fondée en 1603, et placée sous l'invocation de saint Louis, roi. Elle servit aux audiences du tribunal criminel, lors de la terreur révolutionnaire, en 1793, et les bâtiments du couvent furent livrés pour les bureaux de la Préfecture du département; enfin, après diverses transformations, cette maison est devenue, en décembre 1820, le siége du tribunal civil et de la cour d'assises du département.

Les armoiries d'Antoine Capissuchi de Bologne étaient: d'azur à la bande d'or.

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