BnF/Gallica : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5452171c
Il n'existe aucun instrument indiquant quels furent les possesseurs de la terre des Sièyes avant le XIVe siècle ; mais, à dater de cette époque, nous trouvons qu'elle fut longtemps partagée entre divers seigneurs. Un acte du 14 septembre 1311, conservé aux archives des Bouches-du Rhône (B. 442), nous apprend que François Rolland vendit à Guidon Aperioculos ses biens et ses droits sur la terre des Sièyes.
Un acte du 28 août 1325, conservé aux archives de Digne et reproduit dans le tome II du Cominalat, page 204, parle de noble de Barras de Saint-Estève, coseigneur des Sièyes, réclamant à un habitant de Digne un droit pour une vigne que celui-ci possédait près du moulin. Cet habitant était Raimond Turrel ; on lui réclamait pour cette vigne une cornue de raisins, unam cornusatam, dont la valeur était fixée à 7 sols. A la suite de cet acte, on en trouve un autre constatant que le même droit a été payé à Jacques et Reynaudet Aperioculos, également coseigneurs du même lieu (1er septembre 1325). Il y avait donc alors trois coseigneurs.
Un acte du 11 janvier 1334 (archives des Bouches-du-Rhône, B. 442) porte que Jacques Aperioculos vendit à Bertrand Reynier la terre et seigneurie des Sièyes, qu'il tenait de son père, Guidon Aperioculos.
On trouve, en 1479, comme coseigneur, Boniface Isoard, fils d'Antoine, de Digne. Celui-ci avait acheté la moitié de la seigneurie, et, par instrument du 17 avril de la même année, le roi René donna à Rescard Rodolphe les droits de lods et de trezain qui lui étaient dus pour cette acquisition. (Archives des Bouches-du-Rhône, B. 18.)
Antoine Albert, notaire à Digne, reçoit de la Cour des comptes, en l'an 1480, l'investiture de la moitié des droits seigneuriaux des Sièyes. (Ibid., B. 972.)
La même année 1486, l'investiture de la moitié de la seigneurie est donnée par la Cour des comptes à Honoré et Giraud Riquetti, marchands à Digne. Ils avaient acquis cette moitié de Jean de la Penne, qui s'était cependant réservé les hommes liges, exceptis hominibus ligiis, qu'il possédait dans ce château. (Ibid., B. 972.)
En 1497 et le 24 avril, Bertrand Gauffredi prêtait l'hommage pour la terre des Sièyes. (Ibid., B. 23.) La famille Gauffredi est connue sous le nom de Geoffroi, dans diverses délibérations communales. Elle possédait le domaine de la Tour et des Chêniers.
En 1502, Honorat et Giraud Riquetti, marchands à Digne, reçoivent une nouvelle investiture pour la moitié de la seigneurie, qui leur avait été vendue par Jean de la Penne, au prix de 35 florins. Ils versent 38 gros de lods. (Ibid., B. 977.)
En 1503 et le 13 février, l'investiture de la terre des Sièyes est donnée à sieur Elzéar Flotte. (Ibid., B. 972.)
En 1507, Elzéar Meynier, notaire à Courbon, reçoit l'investiture de la cinquième partie du château des Sièyes, acquise pour le prix de 20 florins. (Ibid., B. 981.)
En 1528, Jacques Puget, coseigneur de Fuveau (Bouches-du-Rhône) et des châteaux de Mourières, de Castellet, de la Robine, d'Angles, du Forêt et des Sièyes, par lui acquis en vertu d'une donation entre vifs de Honorade d'Arpille, reçoit l'investiture. Les droits de lods et d'arrière-lods qu'il paya ne s'élevèrent, à cause du mode de transmission de la propriété, qu'à 12 écus d'or au soleil, soit 480 gros de monnaie provençale (l'écu étant compté pour 40 gros). (Ibid., B.991.)
En 1537, on trouve quatre dénombrements de la terre des Sièyes : l'un du 10 avril, pour les sieurs de Jauffred ou Geoffroi (B. 788) ; le second, sous la même date, pour les terres des Sièyes et d'Aiglun, pour Joseph François (B. 788) ; le troisième du 10 avril, pour Marcellin Ambrois (B. 780) ; le quatrième enfin du 19 avril, pour Honorade Riquet (B. 787).
En 1541, on trouve deux autres dénombrements : l'un du 31 octobre pour les terres des Sièyes et de la Tour, pour Jacques Jean et Monet Jauffred (B. 790) ; l'autre du 14 novembre de la terre des Sièyes, pour Marcellin Amalric (B. 790).
En 1543, Honoré de Rochas, seigneur d'Aiglun et des Sièyes, reçoit l'investiture d'une petite coseigneurie sise au lieu des Sièyes, du prix de 24 florins 11 gros (B. 905).
La même année, François Jarente reçut l'investiture de la coseigneurie des Sièyes, qu'il avait acquise d'Honorat de la Penne (B. 935).
Avant l'an 1598, la seigneurie des Sièyes appartenait à N*** de Trichaud, sieur de Saint-Martin.
François de Trichaud, sieur de Saint-Martin et des Sièyes, conseiller au parlement d'Aix, succéda au précédent et se fit aliéner par le curé du lieu quelques terrains, sous la pension annuelle de deux charges de blé ; il posséda jusqu'en 1670.
De Galifet, président au parlement d'Aix, posséda ensuite la seigneurie. Une délibération du conseil (20 octobre 1678) porte qu'il lui sera porté à Aix un présent consistant en fruits, pruneaux et fromages.
Dame Thérèse de Galifet, épouse en premières noces de Clappiers de Vauvenargues et sœur du précédent, possède ensuite la seigneurie. Etant venue aux Sièyes, dans le mois de juillet 1682, on lui offrit également un présent consistant en fromages, fruits et pruneaux.
François de Clappiers de Vauvenargues, fils de la précédente, posséda la seigneurie après sa mort. Il lui fut offert aussi un présent de même nature, quand il vint visiter sa terre en 1687 (1).
(1) M. de Jaubert, lieutenant en la sénéchaussée de Digne et coseigneur des Sièyes, ayant notifié aux consuls le mariage de son fils, le conseil crut devoir répondre a cette politesse par un présent, dont le prix fut réglé à 34 livres 8 sols. (Délibération du 4 mars 1695.)Joseph de Clappiers de Vauvenargues, fils de François, ayant épousé Mlle de Bremond, de Sisteron, il fut délibéré, le 27 septembre 1713, qu'on leur offrirait en présent un quintal de fromages de Thorame, un quintal de prunes sèches et deux veaux. Celui-ci vendit, en 1710, la seigneurie des Sièyes au suivant.
Jean-Louis de Plan (2), trésorier général en la généralité de Provence, acheta la seigneurie de son beau-frère, Joseph de Clappiers de Vauvenargues. On trouve, sous la date du 12 juin 1716, un dénombrement de la terre des Sièyes pour Jean-Louis de Plan, aux archives des Bouches-du-Rhône (B. 801).
(2) La famille Plan, originaire de Mirabeau, canton des Mées, s'était fixée à Digne et y exerçait le commerce de la draperie.Jean de Plan, fils aîné du précédent, né le 1er mai 1707, conseiller au parlement de Grenoble, succéda à son père dans la seigneurie des Sièyes, qu'il augmenta en achetant les domaines de la Tour et des Chêniers (1). Il notifia aux consuls son mariage avec Mlle de Veynes, et on répondit à cette politesse par une délibération du 13 mai 1747, portant qu'en reconnaissance de ses bons offices il lui serait fait cadeau d'un bijou de la valeur de 15 louis (360 francs de notre monnaie).
Sébastien Plan, chef de la famille (1546-1615), se fit chef de partisans pour le service du roi. Il leva une compagnie et alla guerroyer dans la vallée de Barcelonnette. Le roi lui concéda des lettres de noblesse.
François de Plan, son fils, marié, le 12 février 1662, à Blanchette de Jaubert de Pontevez, obtint la charge de trésorier général en la généralité de Provence. Il eut deux fils : Charles de Plan, marié, le 3 février 1663, à Anne de Gassendi et mort sans postérité, et Jean de Plan, marié, le 19 février 1669, à Madeleine Allemand, qui succéda à son père dans la charge de trésorier général.
Jean de Plan eut deux enfants : le premier, né le 11 décembre 1673 et mort en bas-âge, et Jean-Louis de Plan, né le 25 août 1675.
Jean-Louis de Plan, marié à Susanne d'Hugues, acheta la seigneurie des Sièyes, fut aussi trésorier général et fut nommé chevalier. Celui-ci eut trois fils, savoir : 1° Jean-Marie de Plan, dont nous parlerons ci-après ; 2° Gaspard Alexis, né le 10 juillet 1708, qui prit le titre des Augiers, fut fait évêque de Die et fut massacré dans la chapelle des Carmes, à Paris, en 1792 ; 3° André de Plan, qui prit le titre de la Baumelle et fut fait prévôt du chapitre d'Embrun et vicaire général de l'archevêque de cette ville. Il était né le 13 octobre 1714.
Jean-Marie de Plan, né le 11 mai 1707, succéda à son père dans la seigneurie des Sièyes, qu'il augmenta considérablement. Il épousa, en 1747, Mlle de Veynes, obtint une place de conseiller au parlement de Grenoble et laissa trois enfants, savoir : Jean-Baptiste-Louis, qui embrassa la carrière militaire et périt dans l'affaire de Cadoudal ; il était né en 1748 ; Jean-François-Frédéric, né en 1753, qui fut le dernier seigneur des Sièyes ; Armand-Victor, qui obtint un canonicat dans l'église de Digne et mourut dans cette ville.
(1) Il existe aux archives des Bouches-du-Rhône (B. 1345) un procès-verbal dressé en 1635 sur les bions de la Tour, plus un acte de l'an 1636, comprenant les déclarations, réclamations ou remises des pièces sur les francs-fiefs, faites par Balthazar Geoffroi, coseigneur des Sièyes. C'est à la famille Geoffroi qu'appartenaient les domaines de la Tour et des Chêniers.Jean-Baptiste-Louis de Plan, fils de Jean, né en 1748, avait embrassé la carrière des armes et devint lieutenant des gardes du comte d'Artois et chevalier de Saint-Louis. Il épousa, en 1784, Mlle de Virieu-l'Argentière, et, à l'occasion de son mariage, il fut délibéré, le 12 novembre 1786, de lui offrir un présent de douze couverts et d'une grande cuillère d'argent, lors de sa première venue aux Sièyes. Cette délibération prouve l'estime dont jouissait la famille de Sièyes ; mais elle ne ressortit pas son effet, car, retenu par les devoirs de sa charge, le seigneur ne put venir voir sa terre. Les événements politiques l'obligèrent de passer à l'étranger. Fermement attaché à la famille royale, il prit part à l'affaire Cadoudal et il y périt. Jean-Baptiste-Louis avait obtenu, en 1780, des lettres patentes conférant à lui et à ses successeurs le titre de marquis des Sièyes.
Jean-François Frédéric de Plan, marquis des Sièyes et de Veynes, né en 1758 et frère du précédent, avait embrassé la carrière de la marine. Il devait posséder la seigneurie, mais la Révolution grondait. Il émigra et se fixa à Sion, dans la Suisse, et ne rentra en France qu'en 1798. Ses biens avaient été vendus révolutionnairement. Son frère, Armand-Victor de Plan, chanoine de l'église de Digne, qui n'avait point émigré, racheta les terres du Château et de la Tour et les lui abandonna à son retour en France (1).
(1) Le rachat est consigne dans les archives départementales (série Q, 2, art. 166, nos 840 et 841). La vente eut lieu le 2 vendémiaire an IV (3 octobre 1795). Le n° 840 porte : bâtiments, terres, vignes, colombier, etc., 401.000 livres ; le n° 841 porte : bastide et toutes ses dépendances, 202.000 livres ; total 603.000 livres.Il fut nommé contre-amiral et commandant du port de Toulon, en 1815, et se fixa ensuite à Valence, où il fut successivement maire et président du conseil général. Il avait joint à son titre de marquis le nom et la fortune des de Veynes, dont il avait hérité. Il mourut à Paris, en 1829 (2).
(2) Il avait épousé : en premières noces, Mlle de Laurencin, dont il eut une fille (Azélia), mariée au comte Rodolphe de Maistre ; en deuxièmes noces, Mlle Mélanie de Montrond, laquelle mourut aux Sièyes, le 13 mars 1847. De ce dernier mariage naquirent trois enfants, savoir : Louis-Frédéric de Plan, Charles-François-Léo et Amédée-Paul.L'ancien château féodal des Sièyes a disparu depuis plusieurs siècles ; il n'en reste qu'une portion de tour ronde, démolie en partie. Ce reste de tour semble braver les intempéries des saisons et les outrages des hommes. Plusieurs fois frappé par la foudre, il présentait une lézarde considérable sur toute sa longueur, quand enfin, en 1878, un fragment considérable s'en détacha avec un énorme fracas et des nuages de poussière. On crut tout d'abord à la chute de la tour ; mais celle-ci avait résisté a l’ébranlement. Elle reste pour rappeler le souvenir du passé.
Après la ruine de leur château, les seigneurs s'en construisirent un autre au-dessous de l'église du village. Ce ne fut plus un manoir, mais une habitation à larges proportions et avec de vastes appartements. Celle-ci fut délaissée et cédée à plusieurs familles, qui s'y colloquèrent. Dans le commencement du XVIe siècle, une autre habitation seigneuriale fut bâtie sur le bord de la Bléone. On donna à celle-ci le nom dé château, bien qu'elle n'offrit rien qui la distinguât des autres maisons de campagne que l'épaisseur de ses murailles et un ombrage de beaux marronniers plantés sur la façade nord. Le château n'est, en effet, qu'un vaste bâtiment carré sans tours, ni tourelles, n'ayant qu'un étage au-dessus du rez-de-chaussée. Le château ne fut jamais une habitation permanente, mais un simple rendez-vous de chasse.
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