Source : La France pontificale, Honoré Fisquet.45. — ANTOINE GUIRAMAND (1479-1513).
BnF/Gallica : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k204180j/f94.item
Armes : écartelé au 1er et au 4e, d'or, à l'épervier de sable longé de gueules et grilleté d'argent ; au 2e et au 3e de gueules à trois pals d'or, et une cotice de sable brochant sur le tout.
Antoine Guiramand, né en Provence et issu d'une noble et ancienne famille, était fils de Jean Guiramand, seigneur de la Gremuse, et de Catherine de Forbin. Il occupait depuis quelques années un canonicat dans l'église collégiale de Barjols, lorsqu'il fut nommé, en 1479, à l'évêché de Digne. On trouve de nombreux actes de cet excellent prélat depuis l'année 1479 jusqu'en 1512.
Peu de temps après sa promotion, il fut choisi par Charles III, comte de Provence, pour aller, avec François de Luxembourg et Jean de Jarente, chancelier, solliciter auprès du pape Sixte IV l'investiture du royaume de Naples.
C'est ici assurément le lieu de rapporter une bulle spéciale de Sixte IV, du 3 septembre 1479, puisqu'elle confirme les statuts de l'Eglise de Digne que les évêques précédents avaient fait, on y lit :
« Sixte, évêque, etc. »
« Une demande formée par nos fils les Prévôt et Chanoines de l'Eglise de Digne, nous exposait : Que, quoique depuis les temps les plus anciens, cette Eglise possède des statuts et des ordonnances bien rédigées et sagement conçues, concernant la célébration et la conservation du culte divin, la conduite des chanoines et des serviteurs de l'église, l'ornement et la propriété de ladite église ; cependant, par suite de l'incurie et de la négligence de ceux que cela regarde, il arrive souvent que les offices divins n'y sont pas célébrés avec la décence et le respect convenables, à des heures fixes ; mais que beaucoup de serviteurs de cette Eglise, mettant de côté tout respect de l'ordre clérical, et toute honnêteté, se conduisent négligemment et irrévérencieusement, au mépris de la Majesté divine, au scandale des fidèles, et au préjudice de la discipline ; que s'il était statué et ordonné, que conformément aux statuts et aux ordonnances précités, le Prévôt et le Chapitre peuvent punir et châtier les délinquants par la privation des distributions de pain, de vin et d'espèces qui ne doivent être accordées qu'à ceux qui assistent aux offices divins avec modestie, et avec le respect qui est dû, et que si le Prévôt lui-même le Chapitre, les Chanoines et les autres serviteurs de l'Eglise étaient obligés et tenus de l'observation desdits statuts sous peine d'excommunication, cette énormité cesserait, et l'ordre, la grandeur de ladite Eglise serait conservé et le culte divin recevrait le plus grand accroissement pour la gloire de Dieu, et la consolation des véritables fidèles. C'est pourquoi nous avons été humblement supplié par lesdits Prévôt et Chanoines, de remédier à tous ces désordres, en relevant l'état et l'honneur de ladite Eglise, de notre bonté apostolique. »
« Et nous, attendu qu'aux termes des lois canoniques, il est nécessaire que ceux que la crainte de Dieu ne retient pas, soient maintenus au moins par la sévérité de la discipline de l'Eglise, et qu'il est des fautes qu'on serait coupable de pardonner, accédant à leurs supplications, de notre autorité apostolique, Nous ordonnons et statuons, par la teneur des présentes, que le Prévôt, le Chapitre et les Chanoines susdits et toutes les autres personnes attachées à ladite Eglise, soient tenus de l'observation des statuts de ladite Eglise, du moment qu'ils seront honnêtes et non opposés aux sacrés canons, et ce sous peine d'excommunication ; qu'en outre, suivant le temps, lesdits Prévôt et Chapitre puissent et doivent punir et châtier de notre autorité apostolique toutes les personnes qui sont ou seront attachées à ladite Eglise, et qui contreviendront auxdits statuts, par la privation des distributions de pain, de vin et d'espèces, qui ne doivent être accordées qu'à ceux qui assistent aux offices divins avec respect et révérence, et ce suivant la forme et la teneur desdits statuts. Et en outre, que nul, quels que soient sa dignité, son état ou sa condition, ne puisse en être dispensé, ou absous, à moins que ce ne soit de l'exprès consentement desdits Prévôt et chapitre ; les droits et pouvoirs de l'évêque restant toutefois et suivant les temps entièrement intacts. Déclarant dès aujourd'hui complètement nul et sans valeur tout ce qui pourrait être ordonné par une autorité quelconque, sciemment ou non, contre la teneur des présentes, sans s'arrêter même à toutes les constitutions et ordonnances .quelconques qui pourraient leur être contraires. Que nul par conséquent, etc. »
Quelques prieurés furent encore joints et annexés à la mense capitulaire, et notamment celui de Saint-Pierre de Albera près de Thoard, que nous trouvons mentionné dans une bulle de Sixte IV du même mois de septembre 1479. On y lit :
« Une partie de nos fils bien-aimés du chapitre de l'Eglise de Digne nous a exposé que les fruits, les revenus et les produits à la mense capitulaire de l'église bâtie à Digne par l'empereur Charlemagne d'heureuse mémoire, entre deux montagnes et en dehors de la ville, et dotée par lui, se trouvent considérablement amoindris par suite de la stérilité, des orages et de la rigoureuse température qui s'y fait sentir, etc. »
Antoine Guiramand rendit hommage au roi de France le 9 janvier 1481, et le 7 juin de l'année suivante il publia divers statuts auxquels il ajouta plusieurs choses pendant les années de son administration. En 1485, il obtint la prévôté de l'église de Barjols, et il est qualifié dans la bulle qui lui conféra ce bénéfice : Antoine, par la grâce de Dieu et du Saint-Siège apostolique, évêque de Digne, prévôt de l'église collégiale de Barjols, commendataire et administrateur perpétuel du diocèse de Fréjus, etc.
Il envoya, pour le représenter â l'assemblée qui se réunit à Aix en 1487, Pierre Baudon, comme on peut le voir dans Bouche, tome II, page 696. Deux ans auparavant, ainsi que le constatent des chartes du château de Mont-Dragon, au nom d'Eustache de Lévis archevêque d'Arles, Antoine reçut le serment de foi et hommage de quelques personnes qui, à titre bénéficiaire, possédaient divers biens de cette Eglise.
En 1490, Antoine Guiramand traita avec Antoine Brollion, maçon de Barcelonnette pour la construction dans sa ville épiscopale de l'église Saint-Jérôme, à la condition de la construire dans l'espace de cinq ans ; elle ne fut construite qu'en dix ans à cause des guerres et de beaucoup d'autres obstacles. La dépense s'éleva à 6,900 florins, dont 300 donnés par le chapitre, 600 par la ville et le restant par l'évêque qui les paya dans l'espace de trois ans avec les revenus de son évêché ce qui donne 30,000 francs environ de notre monnaie actuelle. La nouvelle église fut bâtie ente le château de l'évêque, transformé plus tard en citadelle, et actuellement en prison départementale, et la tour de l'horloge de la ville. L'emplacement adopté n'a pas permis de bâtir l'église dans la direction de l'Est à l'Ouest, comme le sont toutes les anciennes églises. Les conventions passées à cet effet, se lisent en langue provençale dans les minutes de Bertrand Hesmivy. Cet évêque, digne de vivre dans la postérité, légua aussi une pension annuelle de mille quatre-vingt-dix florins, soit en fruits, soit en argent, pour l'entretien et la couverture de son église. Et non seulement, il avait fait ce legs, mais il voulait encore ajouter à la mense capitulaire le prieuré de Colmars qui lui appartenait, à la seule condition que le chapitre enverrait chaque jour quatre prêtres pour dire la messe dans la nouvelle église de Saint-Jérôme, ce qui devait être très commode pour les fidèles de la ville ; mais cette tentative faite avec intention de la réaliser, ne put pas l'être avant sa mort. Le chapitre néanmoins, qui avait cru à cette promesse, s'acquitta de la charge qu'il avait acceptée. Seulement il décida qu'une des quatre messes destinées à la nouvelle église, serait célébrée, le dimanche surtout, dans la chapelle Saint-Michel qui était situé près de la porte par laquelle on entrait dans l'hôtel de ville. C'était alors un usage solennel que les consuls et les membres du conseil se réunissaient dans cette chapelle pour entendre la sainte messe. Le service de l'église cathédrale fut considérablement diminué par cette obligation de détacher quatre prêtres pour la nouvelle église ; d'autant plus que beaucoup d'autres en étaient éloignés, soit que l'insuffisance de leurs revenus les obligeât d'aller administrer d'antres paroisses, soit qu'ils fussent réduits à gagner leur subsistance de toute autre manière. Tel était pourtant le motif pour lequel Antoine Guiramand voulait annexer à la mense capitulaire le riche prieuré de Colmars, désirant que le défaut de revenus n'éloignât aucun serviteur de l'Eglise.
En 1495, Antoine concède le prieuré de Saint-Vincent, au-dessus du Bourg, aux Frères de la Trinité et de la Rédemption des captifs. C'était un prieuré qui avait été donné cette même année à Michel Cantel, bénéficier. L'évêque obtint sa résignation, et avec l'assentiment du chapitre, le destina, l'assigna, et pour nous servir des termes du notaire, l'incorpora à cet ordre de religieux, et fit du prieuré une administration de l'ordre. L'accord fut fait avec frère Antoine Creyssel du couvent de Montpellier, et quelques-uns des articles de la convention sont conçus en ces termes : En cas de vacance de l'administration, l'évêque pourra y nommer un religieux capable ; son desservant ou son vicaire devra assister annuellement au synode épiscopal, et devra payer à l'évêque deux sous d'or ; toutes les fois que le clergé de Digne fera une procession, il devra s'y joindre avec ses religieux, sa croix en tête ; sur les biens qu'il acquerra, il devra comme les laïques, payer la dîme, etc.
Le clergé de l'assemblée des Etats, à Aix, députa Antoine Guiramand, en 1498, vers le roi Louis XII, afin de prêter à ce monarque, foi et hommage au nom des trois états de Provence. Ce prélat fut aussi délégué en 1503, par le cardinal Georges d'Amboise, légat du Saint-Siège, avec Augustin de Grimaldi, évêque de Grasse, et Cyrille Maurin, abbé de Valsainte, pour réformer les ordres religieux.
Antoine donna sa démission du siége de Digne quelque temps avant sa mort, arrivée le dimanche 22 octobre 1514, et voici l'annotation trouvée en marge du Martyrologe, au 11 des calendes de novembre : Aujourd'hui est mort le révérend Père en Jésus-Christ, le seigneur Antoine Guiramand, évêque de cette Eglise, qui a fait construire dans la ville de Digne l'église de Saint-Jérôme, et a comblé de bienfaits la dite Eglise Que son âme repose en paix : Le 22 octobre 1514.
Son éloge, renfermé dans le Martyrologe, est assez éloquent, et prouve que l'Eglise de Digne a conservé pendant bien longtemps un précieux souvenir de ce prélat, qui l'a comblée de bienfaits et lui a donné tant de preuves de son amour.
Gassendi rapporte qu'on fit en principe la sacristie de l'église Saint-Jérôme à la place de la chapelle qui se trouve à la gauche du presbytère, en pratiquant une brèche au château de l'évêque. Mais lorsque les reliques sacrées furent transférées dans cette église, on reconnut bientôt que nulle part elles ne pouvaient être plus commodément et plus sûrement que dans cette chapelle, c'est pourquoi on en construisit une autre du même côté à la droite du presbytère dont on fit la sacristie. Le mur du presbytère étant d'une très grande épaisseur, on voulut y creuser un arc, dans lequel Antoine Guiramand demanda à être enseveli. Dans le second pillage que la ville de Digne eut à subir de la pari des calvinistes, les ossements de ce vénérable prélat furent retirés de leur sépulcre, et jetés au feu, et cela après qu'une soldatesque effrénée et perdue eut osé se servir de son crâne en en jouant comme d'une boule.
Antoine Guiramand portait pour armoiries : écartelé au 1er et au 4e, d'or, à l'épervier de sable longé de gueules et grilleté d'argent ; au 2e et au 3e de gueules à trois pals d'or, et une cotice de sable brochant sur le tout.
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